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Séminaire

Les applications de la méthode phénoménologique

Séminaire de doctorants et de jeunes chercheurs (février - juin 2021)

animé par Luz Ascarate, doctorante (ISJPS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) & Audran Aulanier, doctorant (CEMS, EHESS)

Ce séminaire propose un parcours qui part d’interrogations théoriques sur l’application de la méthode phénoménologique et d’interrogations génératives concernant le soubassement social et politique de grands concepts phénoménologiques (agir, sujet, description) pour se diriger vers l’application de la méthode phénoménologique à des champs non exclusivement phénoménologiques (politiques, artistiques, coloniaux, sociaux). Deux questionnements principaux sont à l’œuvre. Le premier concerne le statut du sujet ; le second, qui s’imbrique dans le premier, a trait au lien entre imagination, corporéité, volonté et action, notamment politique, dans différents types d’expériences.

Lieu : le vendredi 28 mai de 17h30 à 20h
à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, salle D634, galerie Dumas (1, rue Victor Cousin, 75005 Paris)
ou en visioconférence si la situation sanitaire le requiert
 

Prochaine séance : vendredi 25 juin à 17h30

Phénoménologie sociale

Cristina Vendra
(CEMS, EHESS / Institut de philosophie de l’Académie tchèque des sciences)
Paul Ricœur et Alfred Schütz : pour une phénoménologie sociale de la mémoire collective et du temps commun

Audran Aulanier
(CEMS, EHESS / Institut Convergences migrations)
La cosmo-politique d’Etienne Tassin. Épreuves de la frontières, épreuves pour l’étranger et subjectivation (politique)

Pour chaque séance, il est nécessaire de vous inscrire au préalable en écrivant à :
luz.ascarate@univ-paris1.fr ou/ et audran.aulanier@ehess.fr

 

Résumés des présentations

CRISTINA VENDRA
Paul Ricœur et Alfred Schütz : pour une phénoménologie sociale de la mémoire collective et du temps commun

Dans ces dernières décennies, la philosophie de la mémoire a pu se distinguer et être reconnue comme un nouveau domaine de recherche ayant ses problèmes et théories spécifiques. L’intérêt philosophique sur la question de la mémoire se situe dans le contexte actuel d’une étude interdisciplinaire portant sur les modes d’appropriation et de diffusion des traces du passé en fonction des situations présentes. Toutefois, alors que la mémoire individuelle a été longuement traitée comme sujet d’intérêt philosophique, la notion de mémoire collective trouve ses origines dans le contexte de la sociologie contemporaine, notamment dans les œuvres de Maurice Halbwachs Les cadres sociaux de la mémoire (1925) et La mémoire collective (1950).
Contre toute prédominance du plan individuel sur le plan collectif, mais aussi contre toute absorption du premier dans le deuxième, dans mon exposé je vise à présenter une nouvelle voie pour conceptualiser la mémoire collective et le temps commun. Pour montrer la possibilité de cette médiation entre individualité et collectivité, subjectivité et objectivité, dans le traitement de la mémoire collective, je me propose d’esquisser les lignes principales du dialogue intellectuel entre la phénoménologie herméneutique de Paul Ricœur et la phénoménologie sociologique d’Alfred Schütz.
L’analyse de la mémoire collective que je me propose de développer, a comme point de départ la troisième section de la première partie de l’œuvre de Ricœur La mémoire, l’histoire, l’oubli (2001), intitulée « Mémoire personnelle, mémoire collective ». Tout en prolongeant ses analyses magistrales de la trilogie de Temps et récit (1981-85), où le récit est érigé en planche de salut contre l’aporétique du temps vécu, dans les pages conclusives de la première partie de La mémoire, l’histoire, l’oubli, Ricœur se réfère à nouveau, même si très brièvement, à la phénoménologie du monde social de Schütz. Les notions de monde-de-la-vie (Lebenswelt) et de génération seront essentielles pour comprendre la fécondité de la rencontre entre la pensée ricœurienne et schützienne dans la direction d’une analyse de la mémoire collective.
L’entrecroisement entre l’œuvre de Ricœur et celle de Schütz nous offrira des éléments et des méthodologies pour analyser la nature de la mémoire collective (Qu’est-ce-que la mémoire collective ?), ainsi que son sujet d’attribution (Qui se souvient ?) et son objet (À quoi se rapporte la mémoire collective ?), selon une perspective capable de surmonter à la fois le biais subjectiviste de la phénoménologie idéaliste et la réification des entités collectives que l’on constate dans l’approche sociologique de la mémoire.

AUDRAN AULANIER
La cosmo-politique d’Etienne Tassin. Épreuves de la frontières, épreuves pour l’étranger et subjectivation (politique)

De longue date, Etienne Tassin s’est intéressé à la question du commun : comment se crée- t-il, où peut-il avoir lieu, en quoi un « monde commun » serait-il un remède à la globalisation (dans ses premiers textes) ou aux difficultés occasionnées par la « condition migrante » (dans ses derniers textes). A travers cette attention au commun, il renouvelle le cosmopolitisme en proposant une cosmo-politique non pas éthique (comme chez les Grecs) ou juridique (comme dans la tradition kantienne) mais politique. Phénoménologiquement, ce qui m’intéressera sera la question du statut de l’étranger, qui disparait dans les deux premières versions car absorbé par une pré-appartenance (à des institutions chez les Grecs, à la sphère de la Raison chez Kant et ses continuateurs). Tassin, dans sa cosmo-politique, propose de « prendre au sérieux la figure de l’étranger » en expliquant que c’est par l’agir politique ensemble que le commun se forme. De fait, nul besoin d’une base préalable sur laquelle s’appuyer pour penser la dynamique de mise en commun. Mais, ce faisant, il met continuellement l’accent sur une pensée de l’ouverture qui permettrait de continuer – toujours – à accueillir des participants nouveaux et de les engager dans un agir collectif. Par-là, comme le soulève Joan Stavo-Debauge, il oublie que la capacité à participer est inégalement répartie. S’il se propose de mettre en avant un agir observable (et observé par lui à Calais après 2015), il oublie que ce qu’il observe ne peut pas être une règle générale. Sa cosmo-politique continue à partir d’un sujet, qui doit finalement avoir la capacité de se subjectiver par lui-même. C’est sur cette capacité de subjectivation que se centrera principalement mon intervention. Je tenterai de montrer que la (re)subjectivation de soi est une réponse créative à des requêtes qui viennent heurter le soi. Pour répondre créativement, il ne suffit pas de se trouver dans un espace public ouvert, il faut aussi pouvoir encaisser le choc du pathos, puis il faut pouvoir faire communauté, nourrir la communauté. En la déployant tout de suite à une vaste échelle (Tassin évoque avec emphase l’organisation de la jungle à Calais, ses écoles, ses restaurants, …), il ne prend pas en compte qu’elle commence avant l’agir, dans la capacité responsive. Un milieu est hospitalier avant tout s’il offre la capacité à relancer sa capacité responsive. L’agir ensemble (au plus bas niveau, un regard, une écoute, est un agir ensemble) vient ensuite, peut ensuite s’établir dans l’espace public. Mais il semble que faire de cette ‘puissance d’agir’ un point de départ revienne à donner une importance trop grande au sujet, pris comme point de départ. J’essaierai au contraire de montrer que partir de « scènes » convient mieux (ce que fait toutefois Tassin à quelques reprises, mais pour aussitôt montrer qu’elles donnent à voir une "puissance d’agir").

Programme

vendredi 26 février
La phénoménologie appliquée à l’agir (politique)

Alessandro Colleoni (Fondazione San Carlo, Modène / CRAL, EHESS / Fonds Ricœur)
« La plus haute volonté est celle qui a ses raisons »
Deux modèles non volontaristes de l’action dans la pensée de Paul Ricœur

Dan Di Razza (Académie de Lille, université de Lille)
Une praxis an-archique implique-t-elle une politique du geste ?


vendredi 26 mars
Problèmes opératoires de la phénoménologie post-husserlienne

Circé Furtwängler (ISJPS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
La phénoménologie de Dufrenne : une philosophie transcendantale des relations incarnées dans les régions de l’expérience plutôt qu’une philosophie asubjective

Dan Li (ISJPS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
La méthode de Merleau-Ponty est-elle phénoménologique ? La Gestalt et l’infini


vendredi 16 avril
Percevoir l’image, ressentir son corps, analyses phénoménologiques

Veronica Cohen
(Université de Buenos Aires / Université de Lille / Conicet)
Se mouvoir entre danse et phénoménologie

Rodrigo Y. Sandoval
(Universität zu Köln / Universidad Alberto Hurtado - Chili)
Appropriation phénoménologique du concept de seeing-in dans la théorie des images : une confrontation des théories de Richard Wollheim et d’Edmund Husserl


vendredi 7 mai
Phénoménologies de la violence et de la déviance

Djamel Bentrar (CURAPP-ESS)
De l’intime au social, la typification à l’épreuve

Edouard Jolly (IRSEM / université Paris 2 Panthéon-Assas)
Phénoménologie de la violence


vendredi 28 mai
Phénoménologie de l'expérience : incommensurabilité, singularité et colonialisme

Paul Gossart (STL, université de Lille / artisan d’art)
Situation de l'artisan restaurateur : entre expérience et travail de la singularité

Camilla Caglioti (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et
Luz Ascarate (ISJPS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Fanon (lecteur de Merleau-Ponty) & Wolff (lecteur de Ricœur)


vendredi 25 juin
Phénoménologie sociale

Audran Aulanier (CEMS, EHESS / Institut Convergences migrations)
La cosmo-politique d’Etienne Tassin à l’épreuve de la participation des demandeurs d’asile à la communauté

Cristina Vendra (CEMS / Institut de philosophie de l’académie tchèque des sciences)
Paul Ricœur et Alfred Schütz : pour une phénoménologie sociale de la mémoire collective et du temps commun

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